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Biocoop une expérience de scop bio-équitable

Didier Maillotte
Gérant de la SCOP Biocoop La canopée

Article mis en ligne le 2 juin 2020

par Didier Maillotte
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Didier Maillotte

La responsabilité sociétale des entreprises

La responsabilité sociétale des entreprises est une démarche engagée par une entreprise sur la base du développement durable, schématisée par le croisement de tout : du social, de l’environnement et de l’économique.

Les entreprises qui s’inscrivent dans cette démarche font un état des lieux de leurs pratiques, élaborent un plan d’action avec des outils de mesure et mettent en place un suivi d’amélioration continu. La mise en place est obligatoire pour les entreprises de plus de 500 salariés ou plus de 100 millions d’euros de chiffres d’affaires. Les démarches sont variées et multiples et ne prennent pas en compte la structuration juridique de l’entreprise. Une multinationale, cotée en bourse, doit mettre en place une démarche RSE.

Les cahiers des charges de Biocoop

Dans notre coopérative nationale, Biocoop, gérée par un conseil d’administration composé de représentants de magasins, de représentants de coopératives de paysans bio, d’une représentante d’association de consommateurs et d’une représentante des salariés sociétaires, nous nous appuyons depuis plus de 30 ans autour de cahiers des charges stricts sur la gestion, la distribution, le social et l’écologie.

Ces cahiers des charges canalisent les sociétaires indépendants que nous sommes à respecter une ligne de conduite avec des valeurs fondamentales appliquées par les 630 magasins du territoire et des facteurs de progrès à mettre en action. Par exemple l’obligation d’avoir, à minima 75 % de salariés en CDI, de se fournir avec un fournisseur d’énergie renouvelable sans nucléaire, de respecter la saisonnalité des fruits et légumes, etc…

Nous avons une démarche RSE au niveau national mais pas encore dans nos magasins, c’est-à-dire que nous appliquons les cahiers des charges de la coopérative mais nous ne formalisons pas officiellement un plan d’amélioration pour aller plus loin. Mais nous savons que nous devons le faire, face à des acteurs économiques qui mettent en place beaucoup moins d’actions construites autour des valeurs fortes de coopération, de commerce équitable, de transparence, de solidarité, mais qui l’affichent. Une célèbre chaîne de restauration rapide, par exemple, a construit sa démarche RSE sur des critères de mesure d’envoi des salariés en formation, d’information sur la nutrition et sur l’amélioration de la consommation électrique autant dire les bases de la bonne gestion d’une entreprise.

Le projet local à Besançon et Grand Besançon

Sur le projet local, nous sommes quatre magasins Biocoop sur le Grand Besançon : Biocoop Saint Vit petit dernier depuis un an, Biocoop Vesonbio place Leclerc depuis trois ans et Biocoop La canopée composé de deux magasins l’un à la Mouillère et l’autre à Châtillon-le-Duc. Nous sommes indépendants mais tous sociétaires de notre coopérative nationale et nous sommes liés par les valeurs communes que nous portons.

Notre projet commercial est au service de notre projet politique national et local qui est de participer à la transition agricole, sociale, sociétale et écologique avec l’ensemble des parties prenantes du projet avec lesquels nous nous mettons en réseau permanent.

Le réseau permanent

Les groupements de producteurs bio, sociétaires de la coopérative Biocoop au niveau national par le biais d’une section agricole.

Ils représentent des coopératives de producteurs 100 % bio, font partie des instances de notre coopérative, du CA jusqu’aux différentes commissions. Ils gardent leur indépendance en ne distribuant pas l’ensemble de leur production dans notre réseau. Ils viennent de créer une charte du commerce équitable France en créant le logo « paysannes paysans associé.e.s. »

Notre relation s’inscrit dans une démarche commerce équitable alliant la construction d’un prix rémunérateur pour eux, la durabilité de la relation commerciale et le versement de la prime de coopération représentant 1 % du CA qu’ils ont revendu.

Les producteurs bio de « là-bas »

(nous préférons parler des producteurs d’Ici et de là-bas plutôt que du Nord et du Sud) avec une obligation de commerce équitable sur les thés, cafés, chocolats tablettes, bananes.

Notre coopérative est présente au conseil d’administration de Solidar’monde, Artisans du monde, et nous sommes représentés sur la plate-forme du commerce équitable.

Les producteurs bio locaux et régionaux
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Avec un travail de partenariat également construit sur le recoupement entre les problématiques de production et celles de distribution. Par exemple, nous nous réunissons tous les ans avec une dizaine de maraîchers pour faire le bilan de la saison écoulée, nous projeter sur celle à venir, croiser nos besoins et les possibilités de production maraîchère.

Un exemple : La construction de débouchés dans nos magasins avec un GIE, groupement d’intérêt économique, de maraîchers qui ont créé « La Semencerie » pour se fédérer autour de la production de semences bio locales, reproductibles, adaptables à notre région.

Nous les avons conseillés pour la diffusion dans nos magasins pour les jardiniers amateurs, construit un prix de vente avec eux. Biocoop Vesonbio va accueillir le stockage de leur production dans le sous-sol inoccupé de son magasin.

Les consommateurs

Nous créons une relation qui est basée sur le juste échange et la transparence. Nous leur devons le respect de la promesse politique faite.

Nous nous formons en « vendeur conseil » sur la connaissance des produits et du projet global de notre coopérative, sur les règles de gestion d’hygiène et de mise en avant des produits, mais pas sur des techniques d’atteintes d’objectifs de vente. C’est une règle qui nous permet d’instaurer de la confiance dans la relation créée avec nos clients.

Nous avons un travail très important autour de la traçabilité tant au national qu’au local avec un cahier des charges plus prégnant que celui du bio européen (100 % bio, pas de transport en avion, pas d’OGM, pas de travailleurs détachés dans les exploitations, pas de travail des enfants…)

Les transformateurs.

En plus du cahier des charges précédant, nous sommes maintenant vigilants sur les fonds toxiques de certaines entreprises. Nous nous écartons de celles cotées en bourse. Beaucoup d’entreprises pionnières de la bio sont rachetées par des multinationales. Par exemple Logona rachetée par L’Oréal, Lima rachetée par une multinationale gérée par des fonds de pension américain, Celnat achetée par le groupe qui détient Panzani et Lustucru. Nous nous détachons de ces structures pour privilégier des structures indépendantes. Nous avons créé un fonds de dotation pour accompagner ces entreprises qui ont besoin de fonds pour se développer sans qu’elles aillent chercher des fonds gérés par des gros groupes financiers.

Les sociétaires magasins Biocoop

Ils passent devant une commission lorsqu’ils sont porteurs de projets pour s’assurer de leurs réelles motivations à devenir sociétaires et que les fonds destinés à monter le magasin sont d’origine familiale (ou participative dans le cadre d’une Scop ou d’un SCIC).

Les salariés des magasins.

La création d’une SCOP

À Besançon depuis 14 mois, les deux magasins Biocoop la Canopée ont basculé en SCOP coopérative de salarié.e.s, avec 13 associé.e.s sur les 25 salarié.e.s dont 7 femmes et 6 hommes. Ils prennent ensemble les orientations de l’entreprise sur le principe une personne, une voix quels que soient les apports au capital.

La répartition des résultats

Les résultats de l’entreprise sont obligatoirement répartis entre des réserves impartageables et définitives qui vont permettre les investissements futurs de l’entreprise, une distribution aux salariés généralement par un accord de participation (choix de le gérer nous-même par le biais de la coopérative financière La Nef) et la dernière partie qui peut être distribuée aux salariés associés ou remis en réserve.

Des outils de gouvernance partagée

Nous travaillons des outils de gouvernance partagée pour aller vers de plus en plus d’horizontalité dans la gestion : le gérant élu devient un animateur et non plus un chef ou un manager. Le rôle qui lui est confié est d’assurer que le bateau tient le cap par rapport aux objectifs communs que nous nous sommes fixés.

Les partenaires

Des partenaires nationaux

Nous avons des partenaires nationaux avec lesquels nous tissons des relations locales et régionales : la Confédération paysanne, Solidarités paysans, le CFSI relayé au régional par RéCiDev, Terres de liens, la FNAB représentée en région par Interbio Franche-Comté, la Nef seule coopérative financière qui n’accompagne que des projets à vocation sociale, écologique et culturelle, le réseau Semences paysannes et les Faucheurs volontaires, le collectif pour une Franche-Comté sans OGM dont nous sommes adhérents, les Jardins de cocagne avec l’accueil des paniers des adhérents, la vente de leur jus de fruits, l’accueil de stagiaires.

Des partenaires locaux

Des partenariats tissés au fil des années avec des associations locales. Exemple avec Intermed association d’insertion par l’économique, les Invités au festin autour de la psychiatrie citoyenne, le mouvement Nous voulons des coquelicots pour la lutte contre les pesticides, …

Les points d’amélioration et de réflexion pour l’avenir

  • L’accès à tous de l’alimentation bio. Comment trouver le bon équilibre entre accessibilité prix, juste prix pour les producteurs ?
  • Comment intégrer dans notre projet local de coopérative de salariés, des paysans et des consommateurs ?
  • Comment intégrer des publics plus larges parmi les salariés ? Nous avons actuellement peu de diversité sociale, peu de personne en situation de handicap, peu de personnes en insertion parmi les membres des équipes.

Biocoop à Besançon : un laboratoire permanent pour affirmer qu’un autre monde est possible.

Pour conclure, notre structure n’a pas actuellement une démarche RSE structurée dans le sens de la définition officielle mais notre organisation basée sur la gouvernance partagée, l’intelligence collective, la coopération, le fonctionnement en réseau avec des acteurs qui partagent des visions proches sur les rapports entre l’écologie, le social, le sociétal, une autre vision du monde de l’entreprise fait de notre organisation et notre structure bisontine un laboratoire permanent pour affirmer qu’un autre monde est possible.

Notes :

[1Texte retranscrit parRichard Amis, relu et corrigé par l’auteur.


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