Sommaire
- 1. Arrêter le massacre
- 2. Lutter contre les passeurs
- 3. Fermer les frontières ne sert à rien
- 4. Permettre la libre circulation
- 5. Faire disparaître l’immigration illégale
- 6. Permettre un progrès social
- 7. Faire des économies
- 8. Reconnaître la mobilité comme un droit fondamental
- 9. Lutter contre les inégalités
- 10. Réaffirmer l’humanisme comme projet
« L’humanité de demain se construit avec l’accueil aujourd’hui » [1]
Michel Agier et François Gemenne [2]
Entre 2000 et 2014, 40.000 migrants sont morts aux frontières, dont 22.000 en tentant de rejoindre l’Europe, qui est aujourd’hui devenue, pour eux, la destination la plus dangereuse au monde. Pour la seule année 2014, plus de 3500 sont morts noyés en Méditerranée.
Le décompte macabre continue chaque jour. Et les survivants sont bloqués aux frontières externes mais aussi internes de l’Europe (comme ces derniers jours entre l’Italie et la France), multipliant les situations de mise à l’écart, de violence et d’humiliation. Cela au nom d’une raison d’Etats européens qui disent répondre aux peurs et aux demandes des habitants pour plus de sécurité, de contention et d’imperméabilité.
Et pourtant, nous affirmons qu’il serait plus rationnel, plus juste, plus sûr, d’ouvrir les frontières. A l’opposé de l’idée trop répandue dans les médias et les discours politiques, cette proposition n’a rien d’un fantasme naïf et irréaliste. Au contraire : c’est l’ouverture des frontières qui permettrait enfin de sortir d’un engrenage de violences qui a déjà fait des milliers de morts parmi les migrants, et de dessiner un horizon pour un véritable projet politique européen en matière d’asile et d’immigration.
1. Arrêter le massacre
Ouvrir les frontières, c’est avant tout permettre aux gens de migrer dans des conditions sûres et dignes, c’est vouloir mettre un terme à la tragédie qui se joue actuellement aux frontières de l’Europe.
Fermer les frontières n’entraîne aucune baisse de flux migratoires puisque la mobilité est par ailleurs une réalité sociale valorisée. Cela ne fait que rendre les déplacements plus précaires, plus coûteux et plus dangereux, jusqu’à transformer aujourd’hui la Méditerranée en cimetière.
2. Lutter contre les passeurs
La fermeture des frontières crée le business des passeurs. Ouvrir les frontières, légaliser les mobilités de tous permettrait de mettre fin à ce trafic mafieux profitant de plus en plus d’une économie de la prohibition.
3. Fermer les frontières ne sert à rien
Faire croire que la fermeture des frontières permettra la maîtrise des flux migratoires est une illusion et un mensonge électoraliste. La construction du mur entre le Mexique et les Etats-Unis n’a nullement ralenti les flux migratoires entre les deux pays.
4. Permettre la libre circulation
L’ouverture des frontières permettrait la circulation des personnes, les mouvements d’allers et retours. Beaucoup de migrants sont aujourd’hui coincés en France, car ils n’osent plus en sortir par peur de ne plus pouvoir y revenir ensuite.
5. Faire disparaître l’immigration illégale
Rendre toutes les migrations légales ferait de facto disparaître l’immigration ’clandestine’. Tout projet migratoire étant légitime, l’ouverture permettrait aux migrants de déployer leur plein potentiel économique dans le pays d’accueil. Toutes les études montrent que la contribution économique à leur pays de destination est d’autant plus positive que leur situation y est sûre et légale.
6. Permettre un progrès social
L’embauche des travailleurs étrangers en situation irrégulière dans les pays riches constitue un « dumping social », l’équivalent d’une « délocalisation sur place ». Les pires conditions sociales sont imposées à des travailleurs sans droits. Leur contribution économique est aussi dirigée vers leur pays d’origine et participe au codéveloppement. Cet apport financier des migrants par leurs transferts d’argent au pays est au moins trois fois supérieur à ’l’aide au développement’ officielle des pays industrialisés.
7. Faire des économies
Depuis 2007, Deux milliards d’euros ont été dévolus à la gestion des frontières. Pour quel résultat ? La suppression de Frontex et des politiques sécuritaires ferait économiser plusieurs millions d’euros aux États de l’Union, qui pourraient être réinvestis dans des projets plus constructifs.
8. Reconnaître la mobilité comme un droit fondamental
L’ouverture des frontières reconnaît la légitimité de toute migration et le droit à la mobilité de chacun. Le droit de quitter son pays est inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, mais la fermeture des frontières empêche de le mettre en œuvre.
9. Lutter contre les inégalités
Aujourd’hui, le destin des uns et des autres reste avant tout déterminé par l’endroit où ils/elles sont né-e-s. C’est la fermeture des frontières qui crée cette inégalité insupportable, ce privilège du lieu de naissance.
10. Réaffirmer l’humanisme comme projet
Se préoccuper d’une hypothétique identité, n’est-ce pas refuser de voir la société française telle qu’elle est aujourd’hui : plurielle et en mouvement.
L’Europe réalise que son idéal de croissance infinie est fini. Ce n’est pas pour autant la crise : c’est une autre croissance qui se dessine. Idem pour les migrants : la crise à laquelle on assiste est celle de l’UE incapable de faire face à ce changement de paradigme.
Voir aussi https://eg-migrations.org/