Sommaire
- 1. Le Mouvement Tzuk kim-pop
- 2. Tzuk kim-pop et Terre des Hommes France : une collaboration pour renforcer les processus politiques dans la région
- 3. De la défense des DESCE à la promotion des droits des populations autochtones guatémaltèques
- 4. Les droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux sont interdépendants
- 5. Des relations cordiales avec la plupart des gouvernements municipaux de la région
- 6. Un événement marquant : la formation des femmes et la manifestation du 4 octobre 2012
1. Le Mouvement Tzuk kim-pop
Le Mouvement Tzuk kim-pop [1] est une instance de coordination entre des organisations sociales et non gouvernementales qui y développent une analyse politique et élaborent des programmations des relations cordiales avec la plupart des gouvernements municipaux de la région.
Ce travail est fondé sur la conviction que c’est seulement par une participation consciente et cohérente la plus large possible de tous les secteurs que peut se forger le modèle des interactions sociales dont l’esprit est contenu dans les Accords de paix [2] et les propositions émanant des secteurs populaires organisés de la région de l’Altiplano occidental (Haut plateau occidental) du Guatemala.
Le Mouvement Tzuk Kim-pop se donne pour mission :
- de promouvoir le renforcement des mouvements sociaux en développant des actions qui visent à renforcer les capacités organisationnelles des femmes, des jeunes et des peuples autochtones ainsi que des mécanismes et instruments aptes à susciter le dialogue et la négociation politique avec les administrations municipales, le gouvernement central et la coopération internationale
- de générer, avec la participation des citoyens, le dialogue politique sur le développement intégral et les droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux dans l’Altiplano occidental et le plaidoyer sur les politiques publiques tout en développant une recherche multidisciplinaire dans le domaine du développement durable.
2. Tzuk kim-pop et Terre des Hommes France : une collaboration pour renforcer les processus politiques dans la région
Nous avons commencé à travailler avec Terre des Hommes France en 2005, lors de la constitution du Collectif pour le Dialogue en Amérique Centrale, le CAD. Cette coordination de diverses organisations centraméricaines a mis en place des initiatives nationales (Guatemala) et régionales (Amérique centrale) avec entre autres objectifs le rapport avec les politiques de l’Union européenne, la question de l’intégration, l’Accord d’association et les mouvements sociaux bi-régionaux. Terre des Hommes France a été pendant tout ce temps, un outil stratégique de collaboration pour renforcer les processus politiques dans la région. Par la suite, nous avons initié une phase de consolidation du travail au Guatemala par la promotion des droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux dans le respect de la culture des peuples et des territoires autochtones.
3. De la défense des DESCE à la promotion des droits des populations autochtones guatémaltèques
À partir du travail que nous avons mené avec l’accompagnement de Terre des Hommes France, notre organisation a initié des formations sur le contenu et les mécanismes de mise en œuvre des différentes normes nationales et internationales dans le domaine des droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux. Nous avons réussi à ce que les organisations sectorielles et communautaires développent leurs connaissances sur les droits en se focalisant sur les rapports avec les autorités. C’est auprès des peuples autochtones que ce programme a connu le plus de succès car dans cette région il y a des départements où 97% de la population est autochtone.
La création d’agendas sectoriels
Tout au long du processus de mise en œuvre, ont été menées des actions pour renforcer l’organisation, la coordination et l’élaboration de propositions. Le mouvement Tzuk Kim-Pop et ses partenaires ont pu réaliser des « agendas » sectoriels [3] : l’Agenda Politique de la Femme Maya du Haut plateau Occidental, l’Agenda Politique Régional des Peuples autochtones et l’Agenda de la Jeunesse. Tous trois se situent dans la perspective des droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux et des peuples autochtones.
L’implication du Conseil politique des femmes de la région de l’Altiplano occidental dans la planification et l’exécution des actions prévues dans le projet ainsi que les initiatives des groupes paysans et des associations locales ont été fondamentales. Elles ont manifesté leurs capacités d’organisation pour continuer à impulser les propositions et les demandes des femmes de la région.
Deux nouvelles organisations se sont créées : QUETZALI, pour l’émancipation politique et sociale des femmes et SINEGIA JUVENIL pour la participation sociale des jeunes, toutes deux sont sectorielles. Elles ont pour but la connaissance, la diffusion des savoirs, l’exigibilité et la justiciabilité des droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux.
Les femmes, les jeunes des peuples autochtones et les élections
La stratégie de la participation des peuples autochtones a été renforcée. Les femmes et les jeunes ont été impliqués dans le processus électoral. Qu’il s’agisse des inscriptions sur les registres électoraux, de la réalité du droit d’élire et d’être élu ou de la transparence des élections, ils ont contribué à l’exercice des droits et devoirs du citoyen et de la citoyenne Guatémaltèques.
La création d’espaces d’expression pour la société civile
Les espaces d’intervention au niveau départemental, régional, national, d’Amérique centrale et d’Amérique latine sont devenus des espaces importants pour la société civile car c’est là que sont présentées des propositions qui ont émergé des communautés de base de l’Altiplano occidental. Ces espaces ont été utilisés pour exposer et défendre l’exigence du respect des droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux des communautés autochtones de l’Altiplano occidental.
La connaissance des droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux, un moyen de renforcer l’estime de soi
Le Mouvement Tzuk Kim-pop promeut l’élaboration de rapports sur l’état des droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux dans les territoires autochtones car c’est un instrument essentiel des sociétés défavorisées pour démontrer avec des données, la situation qui les opprime.
Les organisations de femmes, de jeunes et des peuples autochtones quand elles sollicitent les pouvoirs publics et les fonctionnaires, font valoir les droits qui les concernent et les instruments juridiques qui y sont afférents. Ils présentent des arguments juridiques pour faire valoir leurs demandes, ce qui leur donne plus de poids et génère une attitude d’égalité devant les autorités officielles.
La connaissance des droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux permet ainsi aux négociations avec les organismes officiels de faire valoir des arguments qui les protègent sur des bases juridiques
Elle permet aux organisations de femmes, de jeunes et des peuples autochtones, de renforcer leur estime de soi, nécessaire à la poursuite de la lutte pour faire valoir leurs droits et exiger leur application.
4. Les droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux sont interdépendants
Tous les droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux dans les territoires des autochtones, du fait de leur interdépendance, sont notre priorité.
La méthode de l’éducation populaire
La méthode appliquée est celle de l’éducation populaire qui comporte trois points importants :
- Pratique : connaître l’état des droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux dans la vie quotidienne.
- Théorie : présenter les concepts, les définitions, les doctrines, les réglementations, les cas résolus, la jurisprudence, etc...
- Pratique : retour à la pratique, mais enrichie par la théorie.
Les activités qui se développent selon cette méthode :
- Les réunions de conseil et d’accompagnement
- les ateliers-séminaires
- les Réunions intersectorielles
- la formation diplomante et les séminaires permanents
- l’élaboration de rapports sur l’état des droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux, la participation et le plaidoyer
- les Festivals de film communautaire où ont été présentés les films “Siwan Tinamit” dont on peut trouver un extrait sous-titré en français sur le site de Terre des Hommes France et “Por un B’Aktun descolonizado”
Quelques résultats
Commission de la femme dans les Conseils municipaux
Les organisations de femmes ont exigé que la Commission de la femme dans les Conseils municipaux soit institutionnalisée et qu’elle soit reconnue dans la législation municipale. C’est devenu officiel lors de la réforme du Code municipal de Septembre 2010, décret 22-2010, qui est ajouté à l’article 26 bis : Commission de la Femme.
Vote de loi contre le féminicide
Les organisations des femmes ont analysé et dénoncé le caractère inconstitutionnel de l’opposition à la loi contre le féminicide. La Cour Constitutionnelle a statué en faveur des femmes et la loi est entrée en vigueur, selon la résolution 3009-2011.
La participation de la société civile aux décisions constitutionnelles
- Les organisations de jeunesse ont été impliquées dans l’élaboration de la loi sur la jeunesse.
- Les autorités autochtones dans de nombreuses parties du pays et principalement dans la région, ont promu diverses consultations communautaires ; à ce jour, on en compte 65 dans tout le pays.
- Les plans municipaux de 2011 ont été élaborés avec la participation des jeunes, des femmes et des dirigeants autochtones et ils ont intégré les droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux.
- Des réformes constitutionnelles ont été désapprouvées, car, selon l’analyse des leaders régionaux sur les thèmes soutenus par TDHF, elles violaient les droits des peuples autochtones et des groupes vulnérables. Ce n’est qu’en prenant en compte la totalité des droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux que peuvent apparaitre les scénarios les plus favorables pour les peuples.
Pour l’avenir : une priorité : renforcer l’alliance politique entre le Mouvement Tzuk Kim-pop et Terre des Hommes France.
Une priorité est de renforcer l’alliance politique entre le Mouvement Tzuk Kim-pop et Terre des Hommes France, de développer des processus d’échanges sur des thèmes comme les droits économiques, sociaux, culturels, et environnementaux, l’intégration régionale, la coopération au développement, le plaidoyer en France, dans l’Union européenne et au Guatemala, le renforcement des mouvements sociaux, la solidarité entre les peuples et la poursuite de la réflexion pour une nouvelle pensée politique sur des sujets d’intérêt commun.
5. Des relations cordiales avec la plupart des gouvernements municipaux de la région
Le Mouvement Tzuk Kim-pop et ses organisations entretiennent des relations cordiales avec la plupart des gouvernements municipaux de la région.
Nous attendons des autorités municipales :
- que nous avancions de manière coordonnée dans le renforcement des commissions municipales, qui traitent des questions de la plus grande importance pour la région : l’éducation, la santé, les femmes, les jeunes, les enfants, l’environnement.
- que nous avancions ensemble pour organiser la politique municipale, à partir des droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux des peuples autochtones afin de promouvoir des pratiques et la gouvernance démocratiques.
6. Un événement marquant : la formation des femmes et la manifestation du 4 octobre 2012
La formation des femmes
La formation des femmes et leur reconnaissance officielle comme autorités autochtones dans le canton de Totonicapán en 2012 a été le résultat le plus marquant : en effet, depuis 2012, l’autorité autochtone de Totonicapán est assurée par une jeune femme.
Le Mouvement Tzuk Kim-pop a promu et a accompagné le processus de renforcement des capacités des femmes des collectivités autochtones, par une formation continue de six sessions.
La manifestation du 4 octobre 2012
Les femmes, autorités autochtones, dans le cadre de leur participation, encouragées et soutenues dans leurs actions pour exiger le respect de leurs droits, ont exigé que soient examinés trois thèmes fondamentaux par le gouvernement du Guatemala :
- non à la réforme constitutionnelle, car elle favorise et exclut les intérêts minoritaires des peuples autochtones et des groupes vulnérables ;
- demande de révision des tarifs d’électricité, qui sont démesurés pour les pauvres ;
- non à la réforme de l’éducation, parce qu’elle porte atteinte aux droits des peuples autochtones.
Comme le gouvernement n’avait pas accepté leurs revendications, les communautés du canton de Totonicapán ont décidé de prendre des mesures pour faire pression sur le gouvernement de l’époque et attirer son attention. Elles ont décidé de bloquer la route panaméricaine en signe de protestation. Sans attendre, le gouvernement a donné sa réponse en faisant appel aux forces de l’ordre, armée et police nationale, qui ont réprimé la manifestation en lançant des gaz lacrymogènes et en tirant au hasard, ce qui s’est soldé par huit morts et de nombreux blessés [4].
Cela montre qu’il est important de renforcer les capacités de leadership local, de sorte qu’on puisse rendre effectives les revendications, mais aussi que nous avons toujours un oppresseur qui continue de violer les droits, quels qu’ils soient, de tous ceux qui en ont été historiquement exclus : les femmes et les peuples autochtones.