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Le 7 mars, jour de la form’action, une semaine avant la déclaration de confinement quasiment universel
Lorsque, le 7 mars, nous nous sommes retrouvés, une soixantaine de participants à la 10ème form’action de la délégation du Doubs de Terre des Hommes France, nous ne savions pas encore qu’une semaine plus tard nous serions confinés, avec interdiction de rencontres physiques, avec pour nos rares sorties autorisées la nécessité de tenir les barrières sociales :
Plus de repas partagé !
Plus de bal !
Plus d’échanges directs sans barrière sociale
Quel monde pour l’après ?
Dans cette période de confinement et de post confinement, cette publication en feuilleton, c’est-à-dire répartie sur plusieurs livraisons, comme en 2018 [1], se propose de maintenir un lien entre intervenant.e.s et participant.e.s, d’en créer de nouveaux, via le bouton « réagir ». [2]
Elle souhaite donner quelques pistes de réflexion sur « le monde d’après » : d’après cette expérience de pandémie et de confinement quasiment universelle, qui nous a montré à quel point nos sociétés, industrialisées, dominantes ou pas, sont fragiles et interdépendantes.
Cette période où les problèmes sociaux semblent s’accumuler, alors qu’ils ne sont que la mise en évidence amplifiée d’une réalité omniprésente mais toujours refusée, cette période où les raisons d’espérer semblent s’amenuiser, ne représente-t-elle pas au contraire une opportunité sans précédent pour ouvrir nos imaginaires à tous les possibles ?
Déjà les mots « solidarité », « partage » sont repris et développés à longueur d’émissions et n’appartiennent plus au seul registre des églises et des associations, les expressions de « bien commun », de « long terme » font une timide apparition.
Comment commuer cet élan spontané et affectif en des représentations d’un avenir commun partagé, selon la parole bien connue « Si nous ne sauvons pas ensemble, nous mourrons ensemble » ? Comment créer un mouvement de fond et une action suivie, pour sortir du système actuel fondé sur le « chacun pour soi », qui cautionne en quelque sorte l’exploitation de l’homme par l’homme. Il est tellement plus facile de dire : « c’est impossible » plutôt que d’imaginer un changement de paradigme qui aboutirait à changer notre modèle de société, nos modes de vie, à l’échelle individuelle et collective, nationale, internationale en un mot quelle politique ? quel gouvernement de la cité ? Pour quoi ? Pour qui ? Comment ?
Or, la société humaine proclame depuis 1945 cette volonté de « vivre ensemble », dans un monde fraternel, par la création de l’ONU, qui rassemble actuellement, la majorité des états de la planète, la proclamation de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme en 1948, l’élaboration de plans successifs pour leur réalisation dont le dernier en date l’Agenda 2030, 17 objectifs du développement durable.
On peut être déçu par la médiocrité des résultats d’ensemble, mais force est de constater qu’elle a pour raison l’impéritie des états, davantage animés par des ambitions de domination inféodée à des lobbies industriels et bancaires que par le bien commun de l’humanité.
Mais, la société civile a un pouvoir, comme l’ont montré les différents mouvements sociaux de protestation et d’opposition qui se sont déroulés partout dans le monde en 2019. Elle peut donc être aussi force de propositions et s’organiser pour qu’elles soient suivies d’effets.
En cela, l’agenda 2030 donne une feuille de route, avec ses 17 objectifs du développement durable et leurs modalités d’application. Ils ne se réaliseront que si les états et leurs chefs, animés et poussés par leurs sociétés troquent une politique d’intérêt national contre une politique d’intérêt général pour l’ensemble de la planète, si les nations riches acceptent de partager leur richesse tant à l’intérieur qu’à l’international, si l’économie retrouve sa véritable signification de « gérer la maison » au service de tous, c’est-à-dire de la planète.
La form’action 2020 : Réalisons l’impossible, objectifs du développement durable et citoyenneté
La form’action s’est déroulée comme les précédentes avec exposés débats et ateliers mais aussi avec des nouveautés : un dialogue via Facebook avec le cycliste, globe trotter des ODD David Ligouy, des intermèdes clownesque pour illustrer et distancier, un petit bal folk pour clore la journée.
La form’action avait pour objectif une présentation globale de l’Agenda 2030, et non un passage en revue de tous les ODD.
Sur ces 17 objectifs nous en avons retenu quatre, qui correspondent aux objectifs de Terre des Hommes France réalisés dans ses programmes de solidarité internationale, explicités dans l’ensemble des thèmes traités par les form’actions antérieures et les expositions de la délégation 25 [3] : « l’égalité entre les hommes et les femmes » (objectif 5) pour « réduire les inégalités » (objectif 6) grâce à des institutions efficaces (objectifs 16) et la mise en place de partenariats (objectif 17) avec pour outil l’éducation, ici et ailleurs ; (objectif 4), et une attention particulière sur ce qui apparaît comme essentiel « luttes contre les changements climatiques » (objectif 13). Ainsi, l’objectif Santé et bien être (objectif 3) qui pouvait sembler comme le plus en rapport avec l’actualité n’a pas été étudié en particulier. Mais, en l’état, cette présentation montre la corrélation de tous ces objectifs et l’obligation impérieuse des collaborations interétatiques et de la société civile internationale.
Retour sur dix ans de form’action : se former c’est déjà agir »
Cette form’action est la dixième, et c’est l’occasion de jeter un regard en arrière et d’essayer de dresser des perspectives.
La form’action est fondée sur un double postulat : se former c’est déjà agir, et se former pour agir. L’idée maîtresse reste que la connaissance est le fondement de toute action durable.
Sensibiliser aux droits humains
Une approche internationale
Chaque année depuis 2011, la délégation du Doubs de Terre des Hommes France organise une journée de Form’action. Elle n’est pas destinée à former des « spécialistes » mais à sensibiliser le grand public aux différents domaines des droits humains et particulièrement aux droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux.
Ces rencontres annuelles ont rassemblé environ 60 à 70 intervenant.e.s de toutes disciplines et environ 450 participant.e.s de tous âges et de toutes catégories socio professionnelles, mus par un même désir de partager connaissances et désir d’agir. Elles concrétisent ce droit à l’éducation, en en montrant l’ampleur et la portée puisqu’elle s’inscrit dans un double mouvement de formation continue, et d’éducation populaire.
La première constatation de cette décennie est celle de la cohérence d’un programme fondé sur la diffusion des « droits de l’Homme » ; il s’est élaboré sans planification préalable, mais toujours au prisme de la solidarité internationale, en relation avec les programmes de Terre des Hommes France, et l’actualité. Nous avons ainsi abordé, le droit des enfants, le droit des femmes, le droit des migrants, le droit à l’éducation, le droit à la culture, les instruments internationaux des droits, les Droits économiques sociaux et culturels, la Déclaration universelle des droits de l’Homme, et aujourd’hui Les objectifs du développement durable.
Elles sont d’entrée internationales, par leur sujet même, par l’intervention des partenaires de Terre des Hommes comme intervenant.e.s, Romain Outcha d’Action Sud au Togo, Milena Sinisterra Romero de Colombie, d’associations locales d’accueil d’étrangers comme Miroirs de femmes. Cette caractéristique est encore davantage marquée dans les Actes qui publient les réponses des partenaires internationaux de Terre des Hommes à un questionnaire issu des exposés de la form’action. Elles en enrichissent la portée et suscitent d’autres questionnements
Une approche sensible par les arts
Indépendamment de l’accueil au CDN, c’est-à-dire de la découverte d’un lieu culturel, chaque form’action propose une approche artistique soit sous forme d’atelier, soit dans son final musical ou dansant. En ce sens elle est un creuset de culture commune, créant des passerelles entre des disciplines qu’on ne rencontre guère en un même lieu avec un public diversifié.
Conclusion
Si les form’actions se déroulent selon le même schéma, chaque édition apporte une expérience nouvelle qui est intégrée dans la suivante comme ce fut le cas pour la clôture de la form’action par une intervention musicale. Ainsi les form’actions s’enrichissent d’année en année.
Présentation de la form’action 2020
La form’action 2020 s’est déroulée comme ses prédécesseures avec trois nouveaux éléments, des intermèdes clownesque pour distancier les débats, un dialogue avec le globe trotter de la paix via Facebook, un petit bal folklorique pour clore la journée.
Des exposés débats pour poser la problématique :
- un fonctionnaire honoraire ONU, en charge de la communication. Jean-Pierre Bugada,
- un économiste, fondateur de la revue Alternatives économiques. Denis Clerc,
- un scientifique, chercheur au CNRS, du laboratoire Chrono environnement, Michel Magny,
Une table ronde illustre l’ODD 17

Exemples de politique des institutions élues
- l’Europe par la voix du directeur de la maison de l’Europe en Franche-Comté, Julien Péa ;
- la région de Bourgogne-Franche-Comté par la conseillère régionale en charge du développement durable Mme Liliane Lucchesi ;
- la France, sur un sujet plus circonscrit, Le travail et les femmes : Mme Mélanie Geoffroy, Déléguée Départementale aux droits des femmes et à l’égalité.
Exemples des actions menées par des acteurs de la société civile
- La responsabilité sociale des entreprises (RSE) : Didier Maillotte, directeur de Biocoop La canopé
- L’Éducation : Ligue de l’Enseignement du Doubs mme Marie Pierre Cattet.
Des ateliers pour exemplifier les connaissances du matin

- en rapport avec l’ODD 5 : Comment faire advenir l’égalité des sexes, avec l’association Léo Lagrange

- en rapport avec l’ODD 12 : Consommation et production responsables : Logis 13 eco et RECIDEV

- en rapport avec les ODD 16 et 17 : Droits et moyens du citoyen à faire entendre sa voix
Si la réalisation des ODD peut sembler irréaliste, il n’empêche qu’elles témoignent d’une volonté majoritairement collective à rendre pour tous et par tous la planète vivable, à donner à chacun d’entre nous son statut d’être humain dans son intégralité, physique, psychique.
Dans un monde qui s’interroge sur ses fondements religieux et philosophiques, les ODD, à l’instar de la Déclaration universelle des Droits de l’homme, proposent une sorte de carte des possibles à réaliser contre un pessimisme auto-réalisateur qui fait advenir ce qu’il redoute,

faites quelque chose,
quelque chose
qui vous justifie
qui vous donne le droit
d’être habillés de votre peau,
de votre poil
apprenez
un pas, une danse
apprenez
à marcher et à rire
parce que ce serait trop bête
à la fin
que tant soient morts
et que vous viviez
sans rien faire de votre vie. »
Auschwitz et après, tome 2 : Une connaissance inutile, Charlotte Delbo